“Je suis encore là pour quelques années” : Luc Leccia, plus d’un siècle d’histoire(s)

“Je suis encore là pour quelques années” : Luc Leccia, plus d’un siècle d’histoire(s)

6 novembre 2023 0 Par evelyse vignardet

À l’âge de 103 ans, Luc Leccia impressionne son entourage par son autonomie et sa vivacité, préservées au fil des années. Celui qui a vécu la Seconde Guerre mondiale, a été témoin de l’évolution du monde et de la Corse tout au long du dernier siècle, partage maintenant sa vie avec son épouse, elle aussi centenaire, à Bastia, et il a aimablement accepté de nous recevoir.






Il a traversé les épreuves de guerre, les “Trente Glorieuses”, assisté à l’avènement de la mondialisation, et suivi les avancées scientifiques et technologiques dans tous les aspects de la vie quotidienne. À 103 ans, Luc Leccia est un témoin privilégié de l’histoire, ayant parcouru presque tout le XXe siècle.

 "Je suis encore là pour quelques années" : Luc Leccia, plus d'un siècle d'histoire(s)

Né en 1920 à Marseille, Luc Leccia se trouve en Corse lorsque sa génération est mobilisée pour participer à la Seconde Guerre mondiale. Il quitte alors Oletta pour rejoindre les Forces Françaises Libres en Afrique du Nord, en Tunisie, où il rejoint l’Africa-Corse, un groupe composé à la fois de Nord-Africains et de nombreux Corses.





Ils libèrent la Corse, puis l’Italie, qui était sous occupation allemande. Ensuite, ils participent au débarquement en Provence. “Ceux qui ont survécu ont poursuivi jusqu’au lac de Constance, à la frontière de l’Allemagne, de l’Autriche et de la Suisse”, raconte-t-il.

 "Je suis encore là pour quelques années" : Luc Leccia, plus d'un siècle d'histoire(s)

Pendant cette guerre, il se souvient du manque de préparation, tant pour lui que pour ses camarades, avant d’être envoyés sur le terrain. “Notre formation militaire s’est déroulée à grande vitesse. Par exemple, on ne nous a montré comment lancer une grenade qu’une seule fois. Mais une seule démonstration ne suffit pas.”

 

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L’inexpérience des soldats français contraste avec celle des soldats allemands, des professionnels qui avaient reçu une formation militaire dès l’âge de 16 ans. “Nous étions des appelés, peu formés, presque des figurants plutôt que de véritables combattants. On nous envoyait en première ligne.”






Pendant toute sa période militaire, Luc Leccia a échappé à la mort “des dizaines et des dizaines de fois”. “Je croyais au pressentiment. J’avais des camarades corses qui me disaient, ‘O Leccia, je ne reverrai plus la Corse’, ils pressentaient leur mort. Moi, j’avais au contraire un pressentiment de survie.” Il sourit. “Et cela continue, puisque je suis encore là aujourd’hui.”

 

Après son retour en Corse, libérée de l’occupation, il devient directeur d’école, un métier qu’il exerce jusqu’à la retraite. Après cela, Luc Leccia décide de consacrer son temps à l’art, alternant entre la peinture et la sculpture, ainsi qu’à l’écriture, dévoilant des poèmes, des romans, et des récits sur sa vie.





Aujourd’hui, âgé de presque 104 ans, Luc Leccia est médaillé de la Légion d’Honneur et de la Croix de Guerre, et il continue d’impressionner par son autonomie et sa vivacité. “Je suis encore là pour quelques années”, plaisante-t-il. “Cela ne m’effraie pas.”

 

Il attribue sa longévité à l’amour de sa famille, en particulier à l’amour de sa femme, Marie-Céleste, également centenaire bien que fragilisée par des problèmes de santé. Après 77 ans de mariage, sa tendresse et son affection pour elle restent inchangées. Il chérit également l’amour de ses trois enfants, de ses onze petits-enfants, et même de ses six arrière-petits-enfants.





C’est une grande famille, pour laquelle il demeure un pilier et un modèle. “Il a été un exemple à la fois pour ses enfants et ses petits-enfants”, souligne Jean-Luc Leccia, son fils. “Je ne peux pas imaginer un jour où ils ne seront plus là, Luc et Marie-Céleste. Pour moi, ils sont immortels.”

 

Luc Leccia est bien conscient de ne pas être immortel. “Avec l’âge, on perd tous nos proches, nos amis chers qui disparaissent en cours de route. Maintenant, lorsque je me promène sur la place Saint-Nicolas, je ne retrouve plus mes amis parmi les anciens combattants ou les collègues de l’enseignement. Ils sont partis. C’est pourquoi je ne m’attends pas à durer éternellement.”





En attendant, il profite du temps qui lui reste, entouré de ses souvenirs et de l’amour de sa famille.